Trois nouvelles espèces de Pleurotomariidae
du genre Conotomaria
du Campanien de Charente
Xavier Chaix (1) & Daniel Grenier (2)
(1) 12, rue Saint-Mammes 11160 Villeneuve-Minervois.
E-mail : bernadette.chaix@wanadoo.fr
(2) 12, rue d'Aquitaine 16100 Châteaubernard
E-mail : grenierd75@gmail.com
Trois nouvelles espèces du genre Conotomaria (Pleurotomariidae, Gastropoda, Mollusca) sont ici décrites, Conotomaria lecatae nov. sp., Conotomaria dovilleae nov. sp. et Conotomaria pilonae nov. sp.
Ces trois espèces proviennent de la carrière de Combiers située au lieu-dit "chez Pourrat" en Charente. Pour connaitre le contexe géographique et géologique du site on se reportera utilement au contenu de l'article Pleurotomaria durousseauorum.

Le genre Conotomaria (Cox, 1959)
Ce nouveau genre de Pleurotomariidae est décrit
en 1959 par L.R. Cox, du British Museum, dans la
revue de la Société Malacologique de Londres, qui le
définit de la manière suivante «Conical, anomphalous
to broadly phaneromphalous ; whorls flat or slightly
sigmoidal in outline, peryphery angular, may be
bulging ; selenizone at or above mid-whorl, quite close to suture in some species, not coinciding with
an angulation ; predominant ornament spiral cords ».
L’espèce type désignée est Pleurotomaria mailleana
d’Orbigny, 1843, du Crétacé supérieur.
Une vingtaine d’espèces de Conotomaria ont été
décrites dans le Crétacé, provenant d’Allemagne,
d’Égypte, de France, de Grande-Bretagne, d’Italie,
du Japon et de Pologne. Plusieurs espèces du Crétacé
supérieur français, maintenant rattachées au genre
Conotomaria, sont décrites par d’Orbigny, dans sa
« Paléontologie Française » : Au Cénomanien, quatre
espèces : Pleurotomaria mailleana (p. 253, pl. 195,
fig. 1-10) ; Pleurotomaria cassisiana (p. 266, pl. 202,
fig. 1-4) ; Pleurotomaria falcata (p. 263, pl. 200,
fig. 9-12 et p. 264, pl. 201, fig.1-4) ; Pleurotomaria lahayesi (p. 251, pl. 193, fig. 1-4) et au Turonien :
Pleurotomaria fleuriosa (p. 265, pl. 201, fig. 5 et 6).
Termier (1954), dans sa liste descriptive des espèces
de Gastéropodes du Crétacé supérieur de France,
ne signale aucune espèce se rattachant au genre
Conotomaria. Cependant Kollmann (2005), dans
sa révision de la collection d’Orbigny, précise deux
points : Leptomaria maillei (espèce que Termier, 1954, p. 326, met en synonymie avec Pleurotomaria
mailleana du Coniacien-Campanien décrite par
d’Orbigny), doit en fait être rattaché à Conotomaria
layesi (d’Orbigny, 1843) ; Leptomaria fleuriani
(que Termier, p. 328, met en équivalence avec
Pleurotomaria floriosa, décrite par d’Orbigny), ne
correspond pas à la description de ce taxon, mais doit
cependant être rattaché au genre Conotomaria.
Le plus ancien représentant de notre genre serait
Conotomaria cf. guirandi (?) signalé par Bertling
& Inasalco (1998) dans le Jurassique moyen du
récif de l’Épine (France). Mais son attribution reste
incertaine. En outre, aucune référence officielle
n’existe concernant l’espèce « guirandi ».
Les plus récents représentants du taxon
Conotomaria ont été récoltés par Harasewych
et al., (2009) dans le Danien de l’Île Seymour
(Antarctique). Il s’agit de Conotomaria sorralensis et
de Conotomaria bayeri.
La filiation phylogénétique des Conotomaria, reste
incertaine. La proposition la plus valable, nous semble
être celle du paléontologue hongrois J. Szabo (1980)
qui propose une origine commune, dès le Jurassique
inférieur, avec le genre Obornella (Cox, 1959).
Il est singulier de souligner que la présence,
ou l’absence, d’ombilic ne soit pas retenue parmi
les critères distinctifs du genre Conotomaria. En
effet Moore (1960, p. 219) précise que les espèces
correspondant à ce genre, peuvent présenter un
net ombilic, ou ne pas avoir d’ombilic. De même
Kollmann (2005, p. 233), dans son tableau indiquant
les caractéristiques de Conotomaria ne précise
nullement la présence ou l’absence de ce caractère.
Une révision des espèces à rattacher au taxon
Conotomaria, permettrait sans doute d’invalider
certaines espèces.
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Conotomaria lecatae nov. sp.
Systématique :
Classe Gastropoda Cuvier, 1795
Sous-classe Vetigastropoda Salvini-Plawen, 1980
Ordre Pleurotomariida
Super famille Pleurotomarioidea Swainson, 1840
Famille Pleurotomariidae Swainson, 1840
Genre Conotomaria Cox, 1959
Espèce type : Pleurotomaria mailleana d’Orbigny, 1843 par désignation originale.
Origine : France, Crétacé.
Conotomaria lecatae nov. sp.
Matériel type : Holotype MNHN.F.A84745 (coll. Deschamps –Grenier, n° 479).
Localité-type : Chez Pourrat, Combiers (Charente), Campanien inférieur (Crétacé supérieur),
Dimensions : Hauteur : 55,0mm. – diamètre : 50,0 mm,
Etymologie : En l’honneur de Louise Lecat, mère de Daniel Grenier.
Description : La coquille est de grande taille, conique et à croissance relativement peu rapide. La téléoconque, à spire conique, est constituée de 7 à 8 tours, plans, imbriqués, séparés par des sutures linéaires et profondes et marqués à leur périphérie par une arête saillante. Les tours présentent une sélénizone située juste sous l’angulation. L’angle apical est de 55°. La sculpture spirale est composée de 8 filets, ornés d’une suite de ponctuations en forme de virgules horizontales, reliées les unes aux autres, leur nombre est de l’ordre d’une centaine sur le dernier tour. La base, non dégagée, semble plane ; aucune perforation ombilicale et ornementation axiale ne sont visibles.
Discussion : La morphologie de notre fossile, nous conduit à le rattacher au genre Conotomaria Cox, 1959, vu la forme très conique de la coquille et la position de la sélénizone, située sur l’angulation des tours (COX, 1959 : 238 ; 1960 : 409). L’espèce la plus proche est très certainement Conotomaria fleuriausa (d’Orbigny 1843) [Syntype MNHN.F.R11739 (coll. D’Orbigny) du Turonien de Pérignac (Charente-Maritime) (D’ORBIGNY, 1843 : 265-266, n° 441, pl.201, fig.5-6). Toutefois, notre espèce s’en distingue très nettement, non seulement par la position de la sélénizone, mais surtout par l’absence d’un bourrelet supra sutural, arrondi et saillant chez l’espèce de d’Orbigny. Par ailleurs, elle en diffère également par sa sculpture spirale, qui n’est constituée, ni par des filets
concentriques, ni par des lignes d’accroissement ; Conotomaria lecatae nov. sp. présente seulement des filets spiraux, ornés de ponctuations en forme de virgules reliées entre elles.
Comme le signale KOLLMANN (2005 : pp. 112-113), le taxon décrit par d’Orbigny a été également signalé par TERMIER (1954 :p. 328), sous le nom de Leptomaria fleuriausi [le nom fleuriausi est une émendation injustifiée de fleuriausa – comm. Perso. Pacaud (MNHN)], au Campanien et au Maastrichtien du sud de la France, mais ces fossiles ne correspondent pas à notre espèce ; en effet « leurs tours auraient la face adapicale plus étroite et leur sélénizone se trouverait située sur l’angulation, qui est en position, plutôt inférieure, donc adapicale », ainsi ce dernier caractère pourrait rapprocher l’espèce décrite par Termier de notre fossile.
C’est pourquoi nous proposons la nouvelle espèce Conotomaria lecatae, en l’attente d’une éventuelle révision des Pleurotomaires du Crétacé.
Figure 2 : Conotomaria lecatae nov. sp. (X. Chaix et D. Grenier 2021), Holotype MNHN.F.A84745. (Coll. D. Deschamps – D. Grenier- N° 479) H : 55,0 mm D: 50 mm du Campanien inférieur de Combiers (Charente), Photographies Jean-Paul Foucaud. Publié dans la revue Fossiles – n°49-1er trim. 2022-p.41.
Les moules internes de Conotomaria lecatae nov. sp.
Nous remercions Jean-Paul Foucaud et Mme Dominique Deschamps pour les photographies et Jean-Michel Pacaud (MNHN Paris) pour ses commentaires constructifs sur le manuscrit.
Ces trois exemplaires de moules internes de la carrière de Combiers, actuellement sans nom, sont à attribuer sans hésitation à Conotomaria lecatae. Ramassés dans le Campanien basal de la carrière, ils sont fréquents dans le même niveau que l’holotype.
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Conotomaria dovilleae nov. sp.
Systématique:
Embranchement : Mollusca
Classe : Gastropoda
Ordre : Vetigastropoda
Sous-Ordre : Pleurotomariina
Super-famille : Pleurotomarioidae
Swainson, 1840
Famille : Pleurotomariidae Cox, 1959
Genre : Conotomaria Cox, 1959
Espèce type : Pleurotomaria mailleana
d’Orbigny 1843,
Par désignation originale
Conotomaria dovilleae nov. sp.
Fig. 2A-C
Localité type: l’holotype, le paratype et
deux autres exemplaires sont récoltés en place dans
les calcaires crayeux de la carrière de Combiers
(Charente), lieu-dit « Chez Pourrat ».
Etage: Campanien inférieur (Campanien I, biozone
CI-CII).
Holotype : Spécimen n° 491 (Fig. 2A-B) de la
collection Grenier-Deschamps, conservé dans les
collections du Muséum d’Histoire Naturelle de
Toulouse (Haute-Garonne).
Paratype : Spécimen (Fig. 2C) de la collection
Grenier-Deschamps, conservé dans les collections du
Muséum d’Histoire Naturelle de Toulouse (Haute-Garonne).
Fig. 2A-C - Conotomaria dovilleae nov. sp. A-B : Holotype. N° 491. Calcaires crayeux de la carrière de
Combiers, lieu-dit « Chez Pourrat » (Charente) ; C : Paratype. Même provenance.
Échelle 1 cm ; © Jean-Paul Foucaud.
Dimensions de l’holotype : Hauteur : 34 mm ;
diamètre du dernier tour : 27 mm.
Etymologie : En mémoire d’Henriette Dovillé,
grand-mère paternelle de Daniel Grenier.
Diagnose et description :
Moule interne de forme conique et de taille
moyenne, comptant 7 tours de spire conservés (une
douzaine si le fossile avait été récolté complet).
L’ornementation spirale est composée d’une quinzaine
de filets ornés de fines ponctuations en forme de
virgule horizontale, au nombre d’une centaine par
tour, séparés par des intervalles de taille équivalente.
Aucune ornementation axiale, n’est visible sur notre
échantillon. La base est lisse et porte en son centre
un profond ombilic (Fig. 2B). L’ouverture, mal
conservée, est de forme ovale.
Conotomaria dovilleae, n’est connu à ce jour que
par quatre exemplaires.
Discussion :
La morphologie de notre fossile, nous conduit à le
rattacher au genre Conotomaria Cox,1959, ainsi que
le précise Kollmann (2005, p. 233), en raison de sa
forme conique, de ses tours plans, avec une sélénizone
située sur l’angulation, une base plane et des cordons
spiraux présentant une ornementation ponctuée.
L’espèce la plus proche est très certainement
Conotomaria fleuriosa (d’Orbigny, 1843, p. 265,
pl. 201, fig. 5 et 6) du Turonien de Pérignac (Charente-Maritime). Cependant notre spécimen s’en distingue
par l’absence d’un bourrelet supra-sutural, par un angle
spiral nettement plus étroit, par une ornementation
spirale très différente et par un ombilic nettement plus
ouvert. Une autre possibilité, sans doute plus probable,
serait de le rapprocher du taxon décrit plus haut,
du Campanien inférieur des Charentes, provenant
du même gisement : Conotomaria lecatae Chaix & Grenier (2022, p. 41, fig. 2), dont l’ornementation est
très voisine, mais qui s’en distingue cependant par une
ornementation spirale composée de 8 filets (au lieu
d’une douzaine), une forme beaucoup plus évasée et
surtout par l’absence d’ombilic, justifiant la création
d’une nouvelle espèce, Conotomaria dovilleae, ce
en l’attente d’une révision des Pleurotomaires du
Crétacé.
***
Conotomaria pilonae nov.sp.
Localité type : l’holotype a été récolté en
place dans les calcaires crayeux de la carrière de
Combiers (Charente), lieu-dit « Chez Pourrat".
Etage: Campanien inférieur (Campanien I, biozone
CI-CII).
Holotype : Spécimen n° 492 (Fig. 3A-B) de la
collection Grenier-Deschamps, conservé dans les
collections du Muséum d’Histoire Naturelle de
Toulouse (Haute-Garonne).
Dimensions de l’holotype : hauteur : 40 mm ;
diamètre du dernier tour : 37 mm.
Etymologie: En mémoire de Jeanne-Marie
Pilon, grand-mère maternelle de Daniel Grenier.
Fig. 3A-B - Conotomaria piloneae nov. sp. Holotype. N° 492. Calcaires crayeux de
la carrière de Combiers, lieu-dit « Chez Pourrat » (Charente). Échelle 1 cm.
© Jean-Paul Foucaud.
Diagnose et description :
Moule interne de forme conique et de petite taille,
comportant quatre tours de spire conservés, séparés
par une profonde suture, les tours sont presque plans.
Seule une ornementation spirale est visible, composée
d’environ une douzaine de filets, ornés de fines
ponctuations très rapprochées les unes des autres. La base légèrement convexe est bien conservée, elle est
dépourvue d’ornementation, et porte en son centre un
net ombilic. L’ouverture de forme générale ovale est
malheureusement incomplète.
Pour le moment Conotomaria pilonae, n’est connue
que par un seul exemplaire. Il reste cependant proche
de l’espèce précédemment décrite : Conotomaria
dovilleae dont il se distingue principalement par
une forme conique plus élargie, une ornementation
présentant des filets moins nombreux (10 au lieu
de 15), ainsi que des ponctuations plus fines, moins
aiguës et plus rapprochées les unes des autres.
Discussion :
Comme l’espèce précédente, la forme et
l’ornementation de notre nouveau taxon, nous
permettent de le rattacher au genre Conotomaria
(Cox, 1959), dont le type est Conotomaria fleuriosa
(d’Orbigny, 1843, p. 265, pl. 203, fig. 5-6), espèce
du Turonien des Charentes. Elle s’en distingue
cependant par une angulation, nettement plus étroite,
par l’absence d’un net bourrelet sutural, par une
taille plus petite auquel il convient d’ajouter une
ornementation très différente. Une nouvelle espèce
récemment décrite : Conotomaria lecatae Chaix &
Grenier (2022, p. 41, fig. 2), du Campanien inférieur
de la Charente, est a rapprocher de notre nouveau
taxon mais en diffère cependant par une spire conique
beaucoup plus large, des filets moins nombreux et
surtout par une absence d’ombilic. Ces diverses
remarques nous incitent à la création de notre nouveau
taxon, Conotomaria pilonae, et ce en l’attente d’une
éventuelle révision des Pleurotomaires du Crétacé.
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Références :
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(groupe 2) : Bulletin de la Société d’Histoire
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